Le Palio, la course de la honte
Deux fois par an à Sienne, en Italie se dispute une terrible course de chevaux. Les jockeys montent à cru et sont armés de nerfs de bœuf . Tous les coups sont permis !
Il s’appelait Amoroso. C’était un cheval bai. Il avait 8 ans. Il est mort, l’été 2004, à l’occasion d’une course ultra-violente : le Palio. Lancé à folle allure, il s’est cogné contre l’un des poteaux disposés le long du parcours. Les autres chevaux lui sont tombés dessus et l’on piétiné. La course ne s’est pas arrêtée !
Il est mort, comme cinquante autres chevaux (depuis 1970), pour fêter la Vierge, patronne de la ville. Mais les chevaux, eux, ne sont pas à la fête ! Le Palio est une course folle qui se dispute le 2 juillet et le 16 août. Pendant plusieurs jours, les habitant de Sienne paraissent hors d’eux-mêmes. Ils pleurent, ils rient, ils festoient dans une ambiance électrique. La course du Palio voit s’affronter les différentes « contrada » (paroisses et quartiers de la ville).
Chaque course est disputée par 10 chevaux. Les chevaux sont attribués aux contrada par tirage au sort. Juste avant le départ, un agent de police remet des nerfs de bœufs (sorte de matraques) avec lesquels les jockeys peuvent tout faire. Il tapent leurs propres chevaux pour les faire accélérer et des autres concurrents pour les gêner. Ils se battent également entre eux. La course consiste à faire trois tours du Campo (la place centrale), ce qui ne prend que quelques minutes. Le cheval qui passe le premier la ligne d’arrivée gagne la course, avec ou sans son jockey.
*Drôle de destin :
Bien que la piste soit recouverte de tuf (roche réduite en poudre), les blessures et les collisions sont souvent meurtrières. Si un cheval se blesse ou s’il meurt, il ne peux être remplacé. Le sort du quartier sera alors compromis. Car le cheval représente la chance et le destin. S’il gagne, il sera célébré, béni, adoré … Les jockeys ne sont pas des Siennois mais des campagnards, gardiens de bestiaux sardes ou siciliens. Ils viennent gagner de l’argent, au risque de leur vie.
Sienne est fière de sa course folle et la décrit dans tous ses dépliants touristiques. Elle défend une tradition qui remonte au XVIe siècle. En réponse aux protestations des associations de protection des animaux, le maire affirme qu’il a pris toutes les précautions.
« La mort du cheval a été le fruit du hasard dû à la fois à l’erreur humaine et au comportement de l’animal». De quelle erreur humaine parle-t-il ? De celle qui consiste à armer des hommes de nerfs de bœuf ? Quel comportement animal accuse-t-il ? Celui d’un cheval terrifié par les coups et les cris et qui ne pense qu’à fuir ?
Pauvre Amorso ! Les chroniqueurs de la télévision italienne n’ont même pas mentionné sa mort. Le Palio a sans doute encore de beaux jours devant lui, mais il faut néanmoins continuer à réagir contre cette course de la mort.